Le train de la langue à grande vitesse est bondé toute la nuit.
La ligne 83 du Tram de Bruxelles a été inaugurée le 30 juin 2008 et n’est opérationnelle que la nuit. Le Congo ex-Zaïre a arraché son indépendance un 30 juin, voilà pourquoi. Tram 83, c’est le titre du premier roman de Fiston Mwanza Mujila, à la langue nerveuse et poétique, adapté et mis en scène par Julie Kretzschmar. C’est aussi le nom d’un bar-bordel brûlant et sombre, où tout le monde se presse pour boire, baiser et oublier, dans une ville/pays/monde. Tout un peuple turbulent et menteur s’y côtoie dans un joyeux bazar, toujours au bord de l’émeute poétique. On y croise des enfants soldats et les Demoiselles d’Avignon, des étudiants grévistes et des vendeurs d’organes, des fonctionnaires incognito… et Lucien, fraîchement débarqué de l’arrière-pays, accroché à son stylo, dont chaque phrase cogne une féroce envie de vivre. Julie Kretzschmar fait un spectacle coup de poing de cette écriture qui crache et se libère, une fresque-chaos à l’énergie débordante, un tableau choral syncopé d’une Afrique fantasmée et revisitée.